TEXTE A : Jean de La Fontaine – Fables (XVIIe s.) : La Chauve-souris et les deux Belettes
registre satirique : prouvez-le - Structure du récit : rencontre avec une première belette, rencontre avec une deuxième belette, épilogue, morale - L'animal victime est-il péjoratif ou non ? Justifiez.
TEXTE B : Victor Hugo - La Fin de Satan (XIXe s.) : Extrait
registre épique : prouvez-le (figures de style). Antithèse angélisme vs diabolisme. Les détails du récit, notamment le décor, les descriptions, détaillez le voyage. Faites des comparaisons sur l'Espace et le Temps dans ce texte B et le A - L'animal monstrueux est-il péjoratif ou fait-il pitié, du point de vue du narrateur ? Justifiez.
Comparer la versification et ses effets entre les textes A et B.
TEXTE C : Hélène Carbolic-Roure, « De Dracula à Batman », 2007
registre didactique : prouvez-le. Le double rôle littéraire de l'animal. Vampirisme et justice (Harker, Van Helsing, Bruce Wayne) : expliquez les deux thèmes. Quel rôle joue "la symbolique occidentale judéo-chrétienne" ? et la SVT ? Rapprochez ce texte C du B, car il y a des points communs.
Quels sont les points communs des deux genres que sont roman et BD : expliquez. Conclusion sur l'animal ?
TEXTE D : De petits animaux très spéciaux – Manuel de SVT - 2020
registre didactique : prouvez-le. Pourquoi ce texte est-il totalement différent des 3 précédents ? Expliquez. "Virus, pathogène, épidémiologie" ; quelles sont les explications médicales données ? La chauve-souris n'est-elle qu'un Alien maléfique ici ?
En conclusion, multipliez les comparaisons entre les 4 textes (en identifiant d'autres points communs et d'autres différences).
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Consigne : Les copies qui se complairont à des propos généralisants, surtout s'ils sont recopiés d'on ne sait où, et qui ne prendront pas appui sur des citations précises des textes, seules probantes, se verront attribuées un Zéro.
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Jean de La Fontaine – Fables (XVIIe s.) La Chauve-souris et les deux Belettes
Une chauve-souris donna tête baissée
Dans un nid de belettes ; et sitôt qu’elle y fut,
L’autre, envers les souris de longtemps courroucée,
Pour la dévorer accourut.
” Quoi ? vous osez, dit-elle, à mes yeux vous produire,
Après que votre race a tâché de me nuire !
N’êtes-vous pas souris ? Parlez sans fiction.
Oui, vous l’êtes, ou bien je ne suis pas belette.
-Pardonnez-moi, dit la pauvrette,
Ce n’est pas ma profession.
Moi souris ! Des méchants vous ont dit ces nouvelles.
Grâce à l’auteur de l’univers,
Je suis oiseau ; voyez mes ailes :
Vive la gent qui fend les airs. ”
Sa raison plut, et sembla bonne.
Elle fait si bien qu’on lui donne
Liberté de se retirer.
Deux jours après, notre étourdie
Aveuglément va se fourrer
Chez une autre belette, aux oiseaux ennemie.
La voilà derechef en danger de sa vie.
La dame du logis avec son long museau
S’en allait la croquer en qualité d’oiseau,
Quand elle protesta qu’on lui faisait outrage :
” Moi, pour telle passer ! Vous n’y regardez pas
Qui fait l’oiseau ? C’est le plumage.
Je suis souris : vivent les rats ! ”
Jupiter confonde les chats ! ”
Par cette adroite répartie
Elle sauva deux fois sa vie.
Plusieurs se sont trouvés qui, d’écharpe changeant,
Aux dangers ainsi qu’elle, ont souvent fait la figue.
Le sage dit, selon les gens,
” Vive le Roi ! vive la ligue ! ”
Victor Hugo - La Fin de Satan (XIXe s.) : Extrait
Il se vit devenir monstre, et que l'ange en lui
Mourait, et le rebelle en sentit quelque ennui.
Il laissa son épaule, autrefois lumineuse,
Frémir au froid hideux de l'aile membraneuse,
Et croisant ses deux bras, et relevant son front,
Ce bandit, comme s'il grandissait sous l'affront,
Seul dans ces profondeurs que la ruine encombre,
Regarda fixement la caverne de l'ombre.
L'infini s'entr'ouvrit, fendu comme une toile,
Mais rien ne remua dans la lugubre étoile;
Et le damné criant : Ne t'éteins pas! j'irai!
J'arriverai! reprit son vol désespéré.
Et les volcans mêlés aux nuits qui leur ressemblent
Se renversaient ainsi que des bêtes qui tremblent,
Et les noirs tourbillons et les gouffres hideux
Se courbaient éperdus pendant qu'au-dessus d'eux,
Volant vers l'astre ainsi qu'une flèche à la cible,
Passait, fauve et hagard, ce suppliant terrible.
Et depuis qu'il a vu ce passage effrayant,
L'âpre abîme, effaré comme un homme fuyant,
Garde à jamais un air d'horreur et de démence,
Tant ce fut monstrueux de voir, dans l'ombre immense,
Voler, ouvrant son aile affreuse loin du ciel,
Cette chauve-souris du cachot éternel!
Il vola dix mille ans. Pendant dix mille années,
Tendant son cou farouche et ses mains forcenées,
Il vola sans trouver un mont où se poser.
Satan, comme un nageur fait un effort suprême,
Tendit son aile onglée et chauve, et, spectre blême,
Haletant, brisé, las, et, de sueur fumant,
Il s'abattit au bord de l'âpre escarpement.
Le soleil était là qui mourait dans l'abîme.
L'astre, au fond du brouillard, sans vent qui le ranime
Se refroidissait, morne et lentement détruit.
On voyait sa rondeur sinistre dans la nuit.
Hélène Carbolic-Roure, « De Dracula à Batman », 2007
La chauve-souris connaît un avenir littéraire des plus riches. Dans la symbolique occidentale judéo-chrétienne, la chauve-souris est considérée comme un animal impur, car elle vit la nuit et la nuit est le monde des ténèbres où l'imaginaire de l'homme se déchaîne. Cette créature porte en elle les symboles de tout ce que condamne la société judéo-chrétienne : tout ce qui représente l'autre, dans son aspect dérangeant, différent, terrifiant. La chauve-souris est l'une des plus anciennes créatures que l'on connaisse, elle vient du tréfonds de la préhistoire. Telle que nous la connaissons aujourd'hui, elle date de 45 millions d'années, elle n'a pas évolué depuis. Son évolution est restée en suspens à moins qu'elle ne soit parvenue à la perfection dès son apparition. Est-ce un monstre, un oiseau manqué, un mammifère manqué, une créature dotée de pouvoirs supérieurs ? La chauve-souris est le seul mammifère à savoir voler. En tant que créature nocturne on la croit aveugle, pourtant elle y voit, et elle communique même comme les dauphins par écholocalisation. Cet animal nocturne ambigu, inquiétant mais fascinant est d'abord associé au mal et a donné naissance aux attributs du vampire, dont le maître est Dracula, le prince des Carpates tout puissant du Mal. Le roman de Bram Stoker, à la fin du XIXe siècle, hausse le personnage historique de Dracula au niveau du mythe. Cette oeuvre offre l'expression la plus achevée du roman gothique et donne naissance à un genre, le roman de vampire (= mort vivant qui sort de sa tombe la nuit pour sucer le sang des vivants. Mais aussi espèce de chiroptères d’Amérique centrale et du Sud ; le spectre, vampyrum spectrum, au museau surmonté d’un appendice en forme de lance, mesure 13,5 cm de long pour une envergure de 90 cm.; il se nourrit du sang des Vertébrés homéothermes, dont il incise la peau avec ses incisives supérieures; il provoque chez ces derniers des hémorragies et peut causer des dégâts dans les troupeaux.)
Les premières apparitions de Dracula, dans le roman, sont emplies d'ambiguïté, à la magnificence se mêle l'angoisse. De toute sa personne se dégage une impression de puissance : Jonathan Harker voit apparaître un vieillard immense. Il est « vêtu de noir, des pieds à la tête », porte une « très ancienne lampe d'argent » dont la flamme ne s'éteint pas sous l'effet du vent mais se « tortillait » « en jetant de longues ombres», il est « figé sur place ». La bouche est décrite avec précision : « les dents sont éclatantes et particulièrement pointues », les lèvres sont d'un « rouge vif » qui « soulignait une vitalité étonnante chez un homme de cet âge » (Mina, l'épouse de Jonathan, leur trouvera un aspect « cruel » mais « sensuel ») ses yeux lancent des flammes également de couleur rouge, il est d'une « extraordinaire pâleur » et son image ne se reflète pas dans les miroirs. Van Helsing venu libérer le monde de Dracula écrit « le sang de l'aube commença à rougir la neige ». Le lien entre chauve-souris et vampire devient vite évident lorsque Harker surprend Dracula dans ses évolutions nocturnes : « mes sentiments devinrent répulsion et terreur lorsque je vis le corps entier jaillir lentement de la fenêtre et se mettre à ramper, tête en bas ; Oui il rampait comme une bête avec son manteau qui flottait dans le vent, comme deux monstrueuses ailes animales. Quel homme était-ce donc – ou plutôt quelle créature sous une apparence humaine ? »
Mais, dans les années trente, un nouvel homme chauve-souris va naître : Batman, le défenseur tout puissant du Bien, créé par Bob Kane et Bill Finger. Ce super héros devient vite lui aussi un mythe : à travers ce personnage, la petite créature maléfique de la nuit se transforme en agent du Bien, et devient nuisible pour le Mal ! Elle se sera même féminisée à travers la création, dans les années 50, de Batwoman, la première femme justicière. Comme Dracula, il est séducteur, Bruce Wayne est le « meilleur célibataire de Gotham ». Batman, dont la véritable identité est celle d'un milliardaire playboy et philanthrope, appartient comme Dracula à la classe la plus élevée de la société. Rappelons que Dracula est « sensuel ». Ils sont tous deux également entièrement vêtus de noir. Tous deux sont apparentés également car ils ont une double vie, une vie diurne et nocturne. Comme Dracula qui est « alchimiste », Batman est savant. C'est le meilleur détective du monde. A la suite du meurtre de ses parents alors qu'il n'était qu'un enfant, Bruce Wayne a développé des facultés intellectuelles et physiques pour combattre le crime. Il a prêté serment de débarrasser la ville du Mal et il n'a cessé, depuis l'assassinat de ses parents, de combattre ce Mal qui gangrène le monde, même la police est corrompue. Une chauve-souris qui un jour est venue voler contre sa vitre lui fournit la symbolique qu'il doit utiliser ; il devient alors Batman et oeuvre la nuit où « son apparence est plus efficace ». En effet, cette chauve-souris lui inspire son costume (l'araignée pour Spiderman) : « Les criminels sont superstitieux et lâches, ainsi mon costume devra leur inspirer la terreur. Je dois devenir une créature de la nuit, noire, effrayante ».
Batman n'a aucun pouvoir surnaturel, cependant son intelligence et ses capacités de détective ainsi que sa force physique (il est maître en arts martiaux) mais aussi l'accès à une technologie de pointe en font un super-héros, un être invincible. De la même manière, les héros représentant le Bien dans le Dracula de Bram Stoker, s'ils utilisent des armes primitives liées à la superstition, sont également à la pointe de la technologie de leur temps, ils utilisent par exemple la sténographie et l'enregistrement sur phonographe.
Le roman de Bram Stocker se compose de lettres et de morceaux de journaux intimes. La bande dessinée (comic strip) se compose de cases. Ces deux types d'oeuvres racontent des histoires au sein de séries, les histoires sont racontées par séquences. Le roman de vampire et la bande dessinée appartiennent aux littératures dites faciles.
Ces deux personnages illustrent l'avenir littéraire d'un petit animal qui parce qu'il vient du fond des âges, parce qu'il vit la nuit et surtout parce qu'il est le seul mammifère volant, ce qui dérange l'ordre établi des choses, peut recouvrir des aspects multiples et contradictoires.
De petits animaux très spéciaux – manuel de SVT - 2020
Les chauves-souris sont présentes sur l'ensemble de la planète, à l'exception de l'Antarctique, et occupent des niches écologiques diversifiées. Plus de 1400 espèces de Chiroptères ont été identifiées, soit 20 % de toutes les espèces de mammifères. Ce remarquable succès évolutif peut être attribué aux multiples adaptations que présente ce groupe de mammifères : vol actif, écholocation laryngale, apprentissages vocaux, grande longévité et présence d'un système immunitaire particulier qui leur permet d'héberger des virus qui sont létaux chez les autres mammifères.
La chauve-souris, avec le rat, est un animal satanique puis qu'elle se trouve accusée des épidémies.
Environ 75 % des maladies émergentes sont zoonotiques et la majorité d'entre elles est associée à la faune sauvage. Les chercheurs ont déjà établi qu'au sein de cette faune sauvage, certains groupes taxinomiques comme les chiroptères, les primates, les carnivores ou les rongeurs hébergeaient proportionnellement plus de pathogènes zoonotiques que d'autres en raison de proximité phylogénétique avec l'homme (par exemple les primates) ou de communauté de vie (par exemple les rongeurs ou les animaux domestiques).
Les zoonoses fréquemment associées aux chauves-souris sont les lyssavirus (dont celui de la rage), les paramyxovirus, les filovirus (comme les virus responsables des fièvres hémorragiques Ebola et Marburg) et les coronavirus (comme le virus responsable du syndrome respiratoire aigu sévère et celui de la Covid19).
Certaines particularités écologiques et comportementales des chauves-souris permettent de comprendre pourquoi elles sont réservoirs de nombreuses zoonoses. La première d'entre elles étant la communauté de vie au sein de grandes colonies mélangeant parfois plusieurs espèces et favorisant les transmissions interindividuelles et les contaminations croisées.
Certains comportements reproducteurs (polygamie durable de type harem) pourraient aussi favoriser la transmission de certains virus. Elles sont ainsi souvent en contact entre elles pour leurs abris, leurs zones de chasse ou de nourrissage (par exemple les arbres fruitiers, autour des spots lumineux) ou avec des animaux domestiques.
En plus des nombreuses caractéristiques physiologiques et immunologiques communes avec les humains, du fait de leur statut de mammifères, les chauves-souris partagent aussi avec nous des interactions diverses et anciennes. Elles peuvent d'une part occuper les mêmes espaces que l'homme, notamment pour se loger, elles peuvent ensuite être chassées pour leur viande, ou pour les dégâts qu'elles sont susceptibles de causer (notamment la consommation de fruits dans les vergers).
L'analyse de la plupart des foyers de maladie dont l'origine est imputée aux chauves-souris, permet ainsi d'identifier la voie de transmission directe, de la chauve-souris à l'homme, par morsures lors d'interactions occasionnelles avec les chauves-souris dans leur perchoir ou au sol et par contact avec des fluides (fientes, urine, salive) lors de la capture ou consommation. Les « usages » de ces animaux dépendent des régions du monde, il existe ainsi une grande consommation de chauves-souris en Asie, dans les îles du Pacifique et de l'Océan Indien et en Afrique, continents où il existe de grandes espèces, mais pas en Europe ou en Amérique du sud, où ces grandes espèces ne sont pas présentes.
Des études ont constaté que le vol jouait un rôle important dans le système immunitaire de la chauve-souris : pendant le vol, la température corporelle est plus élevée, ce qui est un mécanisme de défense de l'organisme contre les agressions virales ou bactériennes : elle réduit leur réplication, et augmente l'efficacité des réponses immunitaires.
L'hibernation est caractérisée par un état d'inactivité avec battement cardiaque, température corporelle et fréquence respiratoire diminuées pour économiser l'énergie.
La réplication virale est freinée par les températures plus basses du corps de l'hôte. L'hypothermie a même été considérée comme une stratégie d'adaptation de l'hôte contre les agents pathogènes.
Les périodes de températures très basses pourraient donc compromettre la reproduction de la plupart des agents pathogènes adaptés aux mammifères. L'hibernation est aussi un facteur contribuant à la persistance virale intrinsèque et la persistance trans-saisonnière. Elle permet aux virus de s'amplifier et de réémerger lorsque les conditions de transmission redeviennent favorables, par exemple en présence d'arthropodes vecteurs, lors de la formation de colonies et le déplacement vers les grottes de maternité.
Il est important de favoriser la collaboration entre les biologistes spécialistes des chauves-souris et les médecins et/ou les vétérinaires gestionnaires de crises pour améliorer la gestion sanitaire ou l'épidémiologie prédictive.